Les bonheurs de Sophie
Chapitre 1
Voici un petit récit de mon cru que je livre à votre critique. Comme je suis bavard, je vais tronçonner le texte en plusieurs chapitres, vous pourrez ainsi donner votre avis sur cette histoire, je le précise, de pure fiction. Garrigus.
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Tom, la trentaine, mince, bonne situation, d’apparence réservée était doublement célibataire : de par son statut d’état civil en premier (ce qui facilitait bien les choses, il faut l’avouer) et d’autre part grâce à sa situation de totale liberté conséquence de sa rupture récente avec sa petite amie. Il fallait donc rechercher une nouvelle conquête afin d’agrémenter ses week-end et de partager ses fantasmes dont certains n’étaient pas forcément parmi les plus répandus.
En effet, Tom était clystérophile, c’est à dire qu’il aimait les lavements : en recevoir par ses propres moyens ou par les services d’une brave fille mais aussi et surtout en donner. Comme un acte d’amour est plus facile à prodiguer sur une âme sœur, il est logique de rechercher une personne du sexe opposé. C’est bien là que le terme donner un lavement prend d’ailleurs tout son sens : point de commerce dans cette action, un lavement se donne par pure philanthropie. C’est un cadeau offert comme un pot de l’amitié, pour remplir son devoir et pour soulager sa conscience. Bien entendu, un don doit être accepté par le receveur : il n’y a pas d’échange sans consentement mutuel.
Qu’importe si le destinataire ne voit pas immédiatement les bienfaits qu’il va retirer de l’opération, il suffit juste de le rassurer s’il ne connaît pas avec précision les modalités de l’acte et au besoin de minimiser le détail de la manœuvre afin de le convaincre d’accepter une petite séance, quitte ensuite, à se montrer plus généreux au cours de l’action… Quand la canule est bien en place.
Mais nous n’en sommes pas encore là car avant d’offrir, il faut trouver l’heureuse élue et comme Tom n’était pas un athlète bronzé aux muscles saillants, il fallait trouver autre chose pour attirer l’intérêt des donzelles et les amener progressivement dans les mailles de son filet (ou plutôt dans les tuyaux de ses brocs et autres récipients adéquats). Faire venir seule une nana dans l’antre d’un célibataire n’est pas toujours très facile. Il fallait un prétexte.
Tom aimait bien la photo. A l'époque où se déroule ce récit, il n'y avait pas encore d'appareil numérique. Il fallait envoyer les pellicules pour développement et faire mettre les photos sur papier. Cela prenait un certain temps et on était parfois déçu en regardant les clichés. Pour cette raison mais aussi parce que Tom aimait bien la technique, il y avait longtemps qu'il avait fait le choix de développer lui même ses photos parfois même en couleur à partir de diapositives.
Mais le plus amusant était la pratique du noir et blanc avec la souplesse du cadrage sur agrandisseur et la magie du révélateur qui permet de voir l'image apparaitre progressivement dans la cuvette sous la lumière jaunâtre d'une lampe inactinique. A bien réfléchir, le développement photographique amateur requiers beaucoup d’instruments connus de ceux qui lisent ces lignes pour d’autres usages : cuvettes, thermomètre, minuteur, usage de la sale de bain, seuls les liquides diffèrent…
C'est cette ambiance, cette créativité et cette magie que Tom espérait faire partager à Sophie, sa nouvelle connaissance en espérant ainsi la conquérir. Mais, comme proclamait Jules César après sa victoire sur Pharnace du Pont en -47 av JC : "VENI, VIDI, VICI" (Je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu), il fallait donc faire venir, faire voir et ainsi gagner les faveurs de Sophie ; ce qui était plus vite dit que fait.
Tom avait rencontré cette jeune femme de 22 ans chez des amis la semaine précédente, elle était brune, svelte, de taille moyenne, avait un charmant sourire, semblait cultivée (elle était étudiante en littérature), d’apparence timide et habillée d’un pantalon de ville et d’un chandail classique. D’emblée, ils s’étaient bien appréciés, Tom lui avait parlé photo, de sa passion des techniques de développement photographique et ils avaient échangés leurs numéros de téléphones afin d’organiser une soirée d’initiation. Il était donc temps de passer aux travaux pratiques.
Tom avait choisi un vendredi soir pour présenter son domicile et son petit laboratoire à Sophie. Afin de passer une bonne soirée, Tom avait préparé un petit repas soigné : une dorade royale, préalablement trempées dans un bain d’épices et de jus citron puis cuite au four et servie avec des pommes de terre vapeur, vin blanc Picpoul de Pinet, plateau de fromages et comme dessert, une salade de fruits frais (pomme, banane, orange, pruneau le tout agrémenté d’un peu de grand Marnier).
Après le repas, Sophie expliqua qu’elle avait emmené des négatifs photos datant de ses dernières vacances où elle avait tiré des rues de vieux villages. Tom s’empressa de complimenter son amie bien qu’il aurait préféré choisir ses propres clichés dont certains auraient pu orienter la suite de la soirée… Mais, bon, comme aimait à dire un de ses anciens prof de mathématiques, pour résoudre un problème, on part d’un point A pour arriver à un point B, qu’importe si la ligne n’est pas droite.
Tom s’efforça de présenter son matériel simplement et avec pédagogie : l’agrandisseur en premier pour cadrer le cliché et choisir son grossissement, le choix du diaphragme, la durée d’exposition, la sélection du papier sensible le mieux adapté en fonction du grain souhaité. L’exposition ensuite réglée au minuteur, pas trop longue pour préserver les contrastes, pas trop courte pour permettre la transmission des détails. Enfin, le traitement chimique avec les bains du développeur, d’arrêt et du fixateur et l’étendage des épreuves pour séchage comme des petites culottes sur une corde à linge.
Tout cela prend du temps, il faut parfois refaire une épreuve, changer le cadrage, rajouter du contraste en diffusant plus de lumière sur une zone avec un carton troué, bref, c’est un travail artisanal, imprévisible, passionnant, chronophage, mais en final, quel plaisir de voir « monter » l’image dans le révélateur qui réduit l'halogénure d'argent exposé à la lumière en argent métal plus ou moins noir en fonction de l’exposition.
Bref, il était déjà tard quand les vapeurs chimiques poussèrent les jeunes gens à sortir de la salle de bain pour passer sur le balcon respirer l’air frais.
- Comment as-tu trouvé cette expérience ? demanda Tom.
- Super intéressante, je n’aurais jamais imaginé que l’on puisse faire tous ces travaux avec ses propres moyens. Mais il est plus de 23 heures à présent…
- Je peux te raccompagner mais tu sais, je préfèrerai que tu restes avec moi.
La proposition était abrupte mais avait l’avantage d’être claire. Finalement, après une soirée de grande complicité, ce genre de demande n’avait rien d’incongrue et la demoiselle avait déjà due réfléchir à une telle éventualité.
- Tu n’y va pas par 4 chemins, cher Tom, mais j’accepte répondit Sophie en baissant les yeux.
- Félicitation, ma grande, je vais faire de mon mieux pour que ta nuit soit agréable.
